D’intenses perturbations des chaînes d’approvisionnent jusqu’au S2 2022
Après des performances exceptionnellement fortes depuis le deuxième semestre 2020, le commerce mondial de biens s’est contracté au deuxième semestre 2021. Comment l’expliquer ? Les économies avancées souffrent plus des goulots d’étranglements en matière d’approvisionnement que des difficultés liées à la demande : 75% de la contraction actuelle des échanges commerciaux internationaux en volume est due à l’incapacité des entreprises à produire faute d’intrants et de matières premières, et 25% sont attribués aux délais rallongés de transport.
Les perspectives concernant le transport de marchandises devraient d’ailleurs prochainement s’améliorer : les nouvelles capacités de transports maritimes commandées par les acteurs du secteur devraient être opérationnelles vers fin 2022, et la hausse des dépenses américaines en infrastructures portuaires devrait aider à fluidifier le trafic maritime.
L’Europe particulièrement exposée aux pénuries d’intrants en provenance de Chine
En matière de dépendance aux biens intermédiaires importés, l’Europe est plus exposée que les Etats-Unis. Sans augmentation des capacités de production ni investissement dans les infrastructures portuaires, la normalisation des perturbations affectant les chaînes d’approvisionnement pourrait ainsi prendre plus de temps en Europe, et ne survenir qu’après 2022, surtout si la demande continue de tourner à un niveau plus élevé que son niveau potentiel. En Europe, les secteurs les plus exposés aux pénuries d’intrants sont les équipements ménagers, l’électronique, l’automobile et les machines et équipements.
« La Chine est un facteur de risque important pour l’Europe : nous estimons qu’une baisse de -10% des importations européennes en provenance de Chine entrainerait un recul de l’activité de -6% pour le secteur de la métallurgie, de -3% pour l’automobile (incluant les équipements de transport) et de -1% pour les ordinateurs et l’électronique », détaille Ano Kuhanathan, Conseiller Sectoriel Senior chez Euler Hermes.
Le reshoring et le nearshoring font partie des débats, mais restent encore peu appliqués
Malgré les perturbations actuelles des chaînes d’approvisionnement dans le monde entier, Euler Hermes ne constate pas de tendance claire au reshoring (relocalisation) ou au nearshoring (délocalisation de proximité). La seule exception est celle du Royaume-Uni, qui a dû faire face à des perturbations relatives au Brexit.
Toutefois, le protectionnisme a atteint un niveau record en 2021 et se maintiendra à un niveau élevé en 2022, principalement sous la forme de barrières commerciales non-tarifaires (subventions, politiques industrielles, etc.).
Le commerce mondial devrait augmenter de +5,4% en 2022 et de +4% en 2023
Même s’il est possible que la contraction du commerce mondial se poursuive au premier trimestre 2022, nous prévoyons une normalisation des échanges internationaux de biens dès le deuxième semestre 2022, soutenue par trois facteurs :
- Un ralentissement des dépenses des ménages en matière de biens durables, du fait de leur long cycle de remplacement et d’une évolution vers des comportements de consommation plus durables ;
- Des pénuries d’intrants moins fortes, car les stocks des entreprises sont revenus, et parfois même excèdent, leurs niveaux d’avant-crise dans la plupart des secteurs, avec un CAPEX en hausse (surtout aux Etats-Unis) ;
- Une congestion moindre du fret maritime, comme expliqué précédemment ;
« Le commerce mondial devrait augmenter de +5,4% en 2022 et +4% en 2023, puis retournera ensuite progressivement à son niveau d’avant-crise. Toutefois, cette croissance soutenue risque de se faire au prix de déséquilibres grandissants à l’échelle mondiale. Les Etats-Unis devraient enregistrer un déficit commercial record en 2022-2023 (-1 300 milliards de dollars), au contraire de la Chine qui verra son excédent commercial atteindre en moyenne +760 milliards de dollars. Dans le même temps, la zone euro pourrait également enregistrer un excédent commercial supérieur à sa moyenne des dernières années, de l’ordre de +330 milliards de dollars », explique Françoise Huang, Economiste en charge de l’Asie-Pacifique chez Euler Hermes.
Selon Euler Hermes, l’énergie, l’électronique et les machines et équipements sont les secteurs qui profiteront le plus de la croissance du commerce mondial lors des deux prochaines années. En 2023 toutefois, c’est l’automobile qui tirera son épingle du jeu. A l’échelle régionale, l’Asie-Pacifique continuera d’enregistrer les plus importants gains à l’export dans les années à venir, avec plus de +3 000 milliards d’euros cumulés sur 2021-2023.
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