- A l’échelle mondiale, le nombre de défaillances d’entreprises devrait croître de +6% en 2023 et +10% en 2024
- D’ici la fin de l’année 2024, 3 pays sur 5 devraient retrouver leurs niveaux de défaillances pré-Covid-19
- En France, les défaillances d’entreprises devraient croître de +36% en 2023, avant de se stabiliser en 2024 à 57 000 cas
Une rentabilité qui se tend et des réserves de liquidités qui s’amoindrissent
Comment expliquer cette accélération ? La récession des revenus des entreprises prend de la vitesse, entre une demande mondiale qui tourne au ralenti et un pouvoir de fixation des prix qui s’affaiblit. Ainsi, au second trimestre 2023, la récession des revenus des entreprises a été généralisée dans toutes les régions (-1,9% a/a), pour la première fois depuis mi-2020. Le tout dans un contexte de hausse des coûts, qui tend la rentabilité des entreprises. En conséquence, les positions de liquidité des entreprises se dégradent rapidement, et ne devraient pas s’améliorer avant 2025.
« Les entreprises ont toujours d’importantes réserves de liquidités, de l’ordre de 3 400 Mds EUR en zone euro et 2 500 Mds USD aux Etats-Unis. Mais ces réserves restent largement concentrées entre les mains des grandes entreprises et de secteurs spécifiques tels que la tech. Plus généralement, la plupart des entreprises ne sont pas en mesure d’améliorer leurs positions de liquidités dans un contexte de croissance économique plus lente que prévue pour plus longtemps qu’attendu. C’est pourquoi nous attendons deux accélérations des défaillances d’entreprises à l’échelle mondiale, de +6% en 2023 et +10% en 2024, après +1% en 2022 », explique Aylin Somersan Coqui, CEO d’Allianz Trade.
Les secteurs et entreprises les plus vulnérables sont cette année pris entre le marteau et l’enclume. L’hôtellerie, les transports, le commerce de gros et la distribution sont en première ligne. Dans d’autres secteurs, le rattrapage des défaillances s’accélère. C’est le cas de la construction, où les chantiers en attente sont désormais quasiment terminés, particulièrement dans le segment résidentiel.
« Dans le même temps, les taux d’intérêts élevés pèsent sur la demande dans certains secteurs comme l’immobilier et les biens durables. De quoi mettre la pression sur les secteurs hautement endettés, comme les services publics et les télécoms, des deux côtés de l’Atlantique. De plus, le BFR mondial atteint aujourd’hui un point haut de 86 jours, soit 2 jours de plus que les niveaux pré-pandémie. Avec des taux d’intérêts aussi hauts, le financement du BFR coûte plus cher aux entreprises, ce qui met en situation de risque certains secteurs comme la construction, les machines et équipements et les équipements de transport », ajoute Maxime Lemerle, Responsable des recherches défaillances chez Allianz Trade.
D’ici fin 2024, 3 pays sur 5 auront retrouvé leurs niveaux de défaillances d’avant-Covid-19
A la fin de l’année 2023, la normalisation des défaillances d’entreprises s’achèvera dans la plupart des économies avancées. Cette année, plus d’un pays sur deux connaîtra d’ailleurs une hausse des défaillances à deux chiffres. Ce sera notamment le cas des Etats-Unis (+47%), de la France (+36%), des Pays-Bas (+59%), du Japon (+35%) et de la Corée du Sud (+41%). Et dès la fin de l’année prochaine, trois pays sur cinq auront retrouvé leurs niveaux de défaillances d’avant pandémie. Des deux côtés de l’Atlantique, il faudrait que la croissance du PIB double pour stabiliser les niveaux de défaillances, ce qui n’arrivera pas avant 2025.
« Dans un contexte de croissance économique mondial qui ralentit, les délais de paiements devraient s’allonger, ce qui pourrait encore aggraver la hausse des défaillances dans les trimestres à venir. Selon nos estimations, à l’échelle mondiale, les délais de paiements dépassent déjà 60 jours pour 47% des entreprises, et un jour de délai de paiement additionnel équivaut à un gap de financement de 100 Mds USD aux Etats-Unis, de 90 Mds USD en UE et de 140 Mds USD en Chine. Avec les prêts bancaires qui se raréfient pour les PME, combler ce manque de financement sera un défi complexe à relever », développe Aylin Somersan Coqui.
En France, une nouvelle forte hausse attendue avant une stabilisation à un niveau élevé
Du côté de la France, l’année 2023 devrait donner lieu à une nouvelle forte hausse : les défaillances d’entreprises devraient croître de +36% cette année, après +49% en 2022, pour s’établir à un niveau de 57 000 cas. Fait notable, le nombre de défaillances de grandes entreprises devrait lui aussi croître. La normalisation des défaillances se poursuit donc, et s’étend à tous les secteurs d’activité, avec un effet de rattrapage encore plus important dans les secteurs qui ont été le plus soutenus par les mesures étatiques déployées face à la pandémie dont l’hôtellerie, l’industrie et le commerce. Au final, Allianz Trade estime que dès la fin de l’année 2023, les défaillances d’entreprises dépasseront leurs niveaux pré-Covid de 11% en France.
« En 2024, la réaccélération de l’économie française ne sera pas suffisante pour voir le nombre de défaillances d’entreprises reculer, d’autant plus que les conditions d’accès au crédit ne devraient pas s’assouplir rapidement. Nous nous attendons donc à observer 57 000 défaillances en France l’année prochaine, soit un niveau stable à celui de 2023, et bien au-delà de ce qui était constaté avant la pandémie (+11%) », conclut Maxime Lemerle.