- En 2023, 3 pays sur 4 ont enregistré un rebond des défaillances d'entreprises, soit une hausse de +7% au niveau mondial.
- 2024 pourrait marquer la fin de l’effet rattrapage, avec une troisième hausse consécutive des défaillances d'entreprises (+9%) entraînant 2 pays sur 3 au-dessus de leur niveau pré-pandémique.
- Après ces hausses progressives mais consécutives, les défaillances d'entreprises au niveau mondial pourraient se stabiliser en 2025 (0%) mais en restant à un niveau élevé.
- En 2024, la France devrait dépasser le seuil symbolique des 60.000 défaillances d’entreprise (+7%) avant de se stabiliser à un niveau élevé (55 000 cas) en 2025.
La barre des 60 000 défaillances devrait être dépassée en France cette année, avant une stabilisation à un niveau (toujours) élevé en 2025
En France, les défaillances d'entreprises ont terminé l'année 2023 à un niveau très élevé, avec un rythme qui s’est encore accéléré sur le dernier trimestre (+37%) pour s’établir à 56 700 cas l’an passé, soit au-dessus des niveaux pré-pandémiques (+10% par rapport à 2019). Notons que pour plusieurs secteurs cela signifie un niveau de défaillances très supérieur à celui observé en moyenne depuis 2010 : en particulier le transport/entreposage, l'information/communication, le commerce automobile ou encore l'hôtellerie/restauration. Pour l’'immobilier et la construction le rattrapage s’accélère en lien avec le ralentissement cyclique de l'investissement résidentiel.
« En 2024, la France devrait dépasser le seuil symbolique des 60 000 défaillances d’entreprises après une nouvelle hausse sensible (+7%, soit +4 000 cas pour un total de 60 700 défaillances), compte tenu de la lenteur attendue de la reprise conjoncturelle et des contraintes prolongées en matière de financement, qui risquent de fragiliser davantage des entreprises déjà à la peine pour rembourser les soutiens étatiques liés à la période Covid. Selon nos prévisions, les défaillances d’entreprises françaises devraient ainsi se maintenir à un niveau élevé en 2025 (plus de 55 000 cas) malgré l'impact positif attendu de la reprise économique », précise Maxime Lemerle, Responsable des recherches défaillances chez Allianz Trade.
Les défaillances dépassent (déjà) les niveaux pré-pandémiques dans la plupart des économies avancées
A l’échelle mondiale, comme attendu l'année 2023 a enregistré un rebond rapide et généralisé des défaillances d'entreprises et l'année 2024 a débuté avec des niveaux de défaillances supérieurs à ceux d'avant la pandémie dans la plupart des économies avancées. Le nombre de défaillances d'entreprises a rebondi dans trois pays sur quatre en 2023, la plupart enregistrant une hausse à deux chiffres. Nous avons observé de fortes hausses aux États-Unis (+40% en 2023) et dans la zone euro (+14%), avec les Pays-Bas (+52%), la France (+35%) et l'Allemagne (+23%) en première ligne.
« La hausse des défaillances mondiales s'est accélérée de +6 points de pourcentage (pps) en 2023 par rapport à 2022, modérée uniquement par les baisses observées en Chine (-14%) et dans les marchés émergents tels que l'Afrique du Sud (-13%) et l'Inde (-8%). L'Europe de l'Ouest reste l'un des principaux contributeurs à cette hausse mondiale des défaillances d'entreprises malgré un léger ralentissement (+15% en 2023, -8 pps vs 2022). L'Amérique du Nord a également contribué au rebond mondial, avec une forte accélération (+41%, +43 pps). Un autre facteur d’inquiétude est la hausse des défaillances de grandes entreprises, qui pourrait générer un risque de non-paiement supplémentaire pour les petits fournisseurs : en 2023, un cas par jour a été enregistré au niveau mondial (365) », explique Maxime Lemerle.
L'accélération de la sinistralité mondiale n'est pas encore terminée, mais l’effet rattrapage touche à sa fin
Le ralentissement de la croissance, les perturbations commerciales et l'incertitude géopolitique ouvrent la voie à une nouvelle accélération des défaillances d'entreprises au niveau mondial en 2024. Allianz Trade s'attend à une troisième escalade consécutive cette année (+9%), alimentée par une augmentation continue dans quatre pays sur cinq. Les plus fortes hausses sont attendues aux États-Unis (+28 %), en Espagne (+28 %) et aux Pays-Bas (+31 %).
« Cette hausse généralisée amènerait deux pays sur trois à dépasser le nombre de défaillances d'avant pandémie en 2024, contre un pays sur deux en 2023. L'économie de l'après-chocs apporte un grand nombre de vents contraires et de défis. Ceux-ci vont maintenant tester la résilience des entreprises qui sont devenues les plus fragiles au cours des trois dernières années. Nous pensons que ces développements conduiront les défaillances d'entreprises à se stabiliser à un niveau élevé en 2025 : +12% par rapport à leur niveau de 2019 aux Etats-Unis, +8% en France et +6% en Allemagne », déclare Aylin Somersan Coqui, CEO d'Allianz Trade.
5 réalités et défis attendent les entreprises dans les années à venir
Allianz Trade ne s'attend pas à un tsunami de défaillances d'entreprises tel que celui enregistré au lendemain de la grande crise financière, lorsque les défaillances mondiales avaient respectivement flambé de +17% en 2008 et +19% en 2009. Toutefois, le rattrapage devrait être marqué dans plusieurs pays, en particulier les économies avancées d'Europe, en raison d'entreprises sensibles (les plus exposées aux enjeux de rentabilité et de financement) et de secteurs spécifiques (notamment les secteurs liés au B2C et la construction).
Allianz Trade identifie ainsi 5 défis à relever pour les entreprises dans les années à venir :
- Un resserrement de la rentabilité se profile. Avant de profiter de la reprise mondiale qui se profile à l'horizon 2025, les entreprises devront gérer la décélération de la demande mondiale. Dans plusieurs pays, le niveau d'activité ne devrait pas atteindre le minimum requis pour au moins stabiliser le nombre de faillites. Selon Allianz Trade, la zone euro et les Etats-Unis auraient tous les deux besoin de +0,7pp de croissance supplémentaire du PIB en moyenne en 2024-2025 pour stabiliser leur nombre de défaillances.
- L'incertitude s'accroît, de la géopolitique à l'augmentation des risques de non-paiement. Après une série de chocs ces dernières années, le calendrier électoral chargé de 2024 ajoutera à l'incertitude économique, puisque des pays représentant 60 % du PIB mondial se rendront aux urnes. Ce contexte ajoutera une couche de complexité et de risque aux opérations commerciales, en rendant difficile pour les entreprises de faire des prévisions et des business plans précis, et en créant de la volatilité dans les coûts des intrants. De plus, la réglementation est également en hausse, ce qui pourrait obliger les entreprises à faire des efforts supplémentaires coûteux pour s'y conformer. Notre indice de risque de non-paiement, basé sur notre propre exposition au crédit, révèle que les entreprises sont de plus en plus préoccupées par les impayés, l'indice étant à son plus haut niveau depuis 2022.
- Les conditions de financement et de liquidité restent tendues. Les entreprises continueront d'être confrontées à des financements coûteux, ce qui entretient les inquiétudes quant à leur capacité à absorber les coûts d'emprunt et à atténuer la pression sur la rentabilité globale. Dans le même temps, la disponibilité limitée des financements mettra en péril les secteurs et les entreprises les plus exposés, tandis que le nombre d'entreprises fragiles reste important au Royaume-Uni (15 %), en France (14 %), en Italie (9 %) et en Allemagne (7 %).
- Les nouvelles entreprises seront confrontées à leur premier véritable test de résilience. Nous nous attendons à ce que l'accélération post-pandémique de la création d'entreprises entraîne une hausse « naturelle » des défaillances d'entreprises. En Europe, l'enregistrement de nouvelles entreprises s'est avéré être +14% plus élevé en 2021-2023, par rapport à 2016-2019. Pour ces entreprises, 2024 sera le premier « vrai » test de résilience, en particulier dans les pays qui ont vu les créations d'entreprises les plus récentes, notamment la France (+47%), les Pays-Bas (+28%) et la Belgique (+14%).
- Certains secteurs présentent des risques plus élevés pour l'emploi et l'économie en général. Les secteurs et les entreprises les plus exposés aux risques d'une demande plus faible et prolongée et de coûts de financement élevés sont ceux qui dépendent des dépenses discrétionnaires (fabrication et vente au détail de biens non essentiels, hôtels, restaurants, tourisme et autres activités de loisirs) et ceux à forte intensité de main-d'œuvre (construction, transports routiers, hôtels, restaurants, soins de santé, services spécifiques aux entreprises). La construction et l'immobilier, qui ont déjà connu des hausses notables en Europe et en Asie en 2023, augmenteront le nombre de défaillances d'entreprises au niveau national en raison du ralentissement cyclique et de la démographie des entreprises. La poursuite du rythme le plus récent se traduirait par la faillite de plus de 16 000 entreprises en France, plus de 7 000 au Royaume-Uni, près de 4 000 en Allemagne et 2 000 en Italie.
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