Parmi les risques auxquels est soumise toute entreprise, les fraudes et les impayés figurent en bonne place. L’intelligence artificielle et son corollaire l’analyse prédictive vont apporter des armes nouvelles – très puissantes – à la lutte contre les deux fléaux. Le point sur les opportunités.
Parmi les risques auxquels est soumise toute entreprise, les fraudes et les impayés figurent en bonne place. L’intelligence artificielle et son corollaire l’analyse prédictive vont apporter des armes nouvelles – très puissantes – à la lutte contre les deux fléaux. Le point sur les opportunités.
Depuis toujours, le succès d’une fraude repose sur trois éléments : l’asymétrie d’informations (la victime manque d’éléments pour se rendre compte de l’opération), la manipulation (le fraudeur ment sur ses intentions), le manque de sécurité (le fraudeur pénètre trop facilement dans l’entreprise et ses systèmes d’information). Est-ce la fin de ces principes adoptés par les fraudeurs du monde entier ? Pourquoi pas, car un nouvel arrivant vient perturber les règles du jeu : l’intelligence artificielle.
Les limites des approches statistiques traditionnelles
Les entreprises victimes de fraude et d’impayés n’ont pas attendu l’intelligence artificielle et agissent depuis longtemps pour se prémunir, par exemple avec des systèmes de scoring, de monitoring ou d’analyse financière des clients et des fournisseurs. C’est encore plus vrai dans les secteurs les plus exposés, comme les banques, les assurances ou le commerce en ligne. American Express, par exemple, a été précurseur dans l’application de techniques d’intelligence artificielle pour repérer des scénarios frauduleux. Ces premières générations de moteurs de détection de fraude s’appuyaient sur des méthodes simples, qui ne sont plus suffisantes aujourd’hui.
En revanche, l’intelligence artificielle représente un véritable espoir de rééquilibrer les forces entre les fraudeurs et leurs victimes, et aussi entre ceux qui « oublient de payer leurs factures » et ceux qui en attendent le règlement.
C’est que le phénomène de la fraude est loin d’avoir été éradiqué. Selon une étude mondiale du cabinet EY publiée en 2017, 52% des collaborateurs de grandes entreprises ont déjà été confrontés ou informés de problèmes de fraude. La préoccupation de lutte contre ce fléau figure en bonne place dans l’agenda des directions générales : d’après une étude du cabinet Grant Thornton, publiée en 2017, 99% des managers jugent même cet enjeu important ou très important, contre un peu plus de 85% en 2015. Pour les consultants de EY, « mettre la technologie au service de la lutte contre la fraude et la corruption est clé, l’entreprise doit exploiter intelligemment les nouvelles technologies pour gérer les menaces internes et externes. Détecter les menaces, collecter et analyser des données provenant de sources variées devient indispensable, tout comme d’identifier les types de comportements susceptibles de présenter des risques pour l’organisation. »
Scorer des gros volumes de données en temps réel
Avec l’intelligence artificielle, ce qui était complexe et coûteux devient beaucoup plus accessible, simplement parce qu’il est désormais possible d’analyser des volumes importants de données et de les corréler pour identifier les comportements potentiellement à risque.
Ainsi par exemple, pour lutter contre les fraudes, on peut imaginer des contrôles automatisés portant sur des écritures comptables imputées sur une période réputée clôturée, un règlement déclenché à tort dans un ERP ayant entraîné une sortie de trésorerie significative, la création de salariés fictifs, des comptes clés comportant des flux financiers inhabituels par rapport aux périodes précédentes ou encore des rapprochements entre un bon de retour de marchandises et une sortie de stocks annulée.
Il en va de même dans la prévention des impayés. Selon le dernier baromètre Allianz Trade publié début 2018, 57% des entreprises françaises ont connu des impayés lors des six derniers mois et 83% considèrent que les impayés vont rester stables (75,5%) ou augmenter (7,8%) en 2018. Le traitement des données financières de toutes les entreprises réclame une puissance de calcul proprement phénoménale, qui commence à devenir accessible.
Vitesse et efficacité
L’intelligence artificielle va améliorer considérablement le temps de détection et le périmètre de contrôle, qu’il s’agisse de la lutte contre la fraude ou contre les impayés. « Les algorithmes de détection de fraude ou de recommandation sont des applications directes des techniques d’Intelligence artificielle », assurent les auteurs du rapport sur l’intelligence artificielle publié en 2018 par l’Académie des technologies.
L’intelligence artificielle : pour les PME aussi
L’intelligence artificielle n’est plus réservée aux grandes entreprises. Exemple : La Bécanerie, une PME spécialiste des pièces détachées et de l’équipement des deux-roues motorisés, qui a fait appel à l’intelligence artificielle pour minimiser les risques de fraude et maximiser ses revenus. L’entreprise avait constaté, sur son site d’e-commerce, un taux de transactions frauduleuses de 7%, ce qui représentait près de 6% de son chiffre d’affaires. Les transactions potentiellement suspectes étaient traitées manuellement, mais le client devait alors attendre en moyenne 17 heures avant la validation de son achat.
Grâce à l’intelligence artificielle, La Bécanerie a mis en place quatre types de contrôles : une évaluation du risque pour chaque transaction en temps réel, une intégration des données métiers au moteur d’évaluation du risque, une authentification 3D Secure à la demande, et le traitement automatique des transactions potentiellement à risque. Les technologies d’apprentissage automatique (« Machine Learning ») évaluent statistiquement et dynamiquement le niveau de risque des transactions qui nécessitent une étude approfondie. Résultat pour la PME : une diminution par 3,5 du nombre de « chargebacks » (annulation de paiement).